Frapper légèrement la main d’un bébé lorsqu’il se comporte mal peut paraître bénin. Toutefois, cette action peut entrainer des effets négatifs durables sur son évolution. Analyse avec Clémence Lisembard, directrice des opérations à la Fondation pour l’enfance.
Les parents peuvent parfois considérer des gestes comme frapper la main d’un bébé pour montrer leur désapprobation face à un comportement inapproprié, comme étant mineurs. Cependant, ce type de réaction peut affecter son développement s’il est répété régulièrement.
Les violences éducatives ordinaires comprennent toutes les formes de violences utilisées contre les enfants pour corriger leur comportement. Elles se classifient en quatre catégories :
- les violences verbales, incluant les moqueries, les insultes ou les hurlements ;
- les violences psychologiques, comme les menaces, l’exploitation ou les mensonges ;
- les violences physiques, telles que les gifles, les tiraillements ou les fessées ;
- les violences affectives, comprenant les comparaisons dévalorisantes, l’indifférence ou le rejet.
« Ces pratiques reposent souvent sur une méconnaissance du développement émotionnel et cognitif des enfants. Les parents interprètent mal les actions des enfants, les percevant comme des caprices ou des crises. En réaction, ils recourent à la violence pour obtenir une bonne conduite », indique Clémence Lisembard.
Pourquoi est-il risqué de frapper la main d’un bébé ?
Les violences éducatives ordinaires peuvent entraîner de multiples conséquences pour l’enfant. Comme le souligne l’experte, il est toutefois complexe de déterminer précisément l’impact de chaque acte de violence sur les jeunes enfants. Le contexte, la répétition, la fréquence et l’intensité sont également des éléments à considérer.
Les répercussions sur la santé physique et mentale peuvent être significatives si ces violences sont récurrentes. « On note des conséquences physiopathologiques notables, comme des ulcères, des troubles cutanés, des douleurs persistantes ou de l’asthme. Sur le plan psychologique, cela peut se traduire par une faible estime de soi, un risque accru de pensées suicidaires, parfois dès l’enfance, une propension à l’agressivité et un sentiment de culpabilité. Des études récentes mentionnent également des effets épigénétiques, suggérant que ces violences pourraient modifier l’expression des gènes. Des impacts sur le cortisol, l’hormone du stress, la santé mentale et le vieillissement cellulaire ont été observés. Ainsi, les conséquences des violences éducatives ordinaires pourraient affecter les générations futures », décrit Clémence Lisembard.
La tape sur la main : cette forme de violence peut-elle s’aggraver ?
Il est crucial de différencier la tape donnée pour arrêter un comportement et inciter l’obéissance, de celle qui est spontanée et non préméditée. Dans ce dernier cas, un parent peut réagir rapidement lorsqu’il y a un danger immédiat, comme si l’enfant s’approche d’une surface chaude. Ici, le parent agit sous l’impulsion de la peur et par un réflexe protecteur, sans intention de nuire. Pour que l’enfant comprenne, il est conseillé de s’excuser et d’expliquer la raison du geste, en affirmant que ce n’est pas un comportement à reproduire.
En revanche, frapper la main d’un bébé pour le faire obéir est problématique. « Ce type de violence est susceptible de se manifester sous différentes formes et peut escalader. De plus, l’enfant va stopper son comportement immédiatement, mais il ne comprendra pas la raison de cette réaction. Au-delà des effets épigénétiques, c’est également un modèle éducatif qui s’intègre chez l’enfant et qu’il pourrait reproduire dans sa future famille, ainsi que dans ses relations sociales et professionnelles », explique la directrice des opérations de la Fondation pour l’enfance.
Quels sont les signaux d’alerte de la maltraitance infantile ?
Certains comportements peuvent indiquer une possible maltraitance chez un enfant. Typiquement, un enfant vivant dans un environnement violent peut se montrer réticent à explorer son entourage. Il tend à être excessivement calme et évite les interactions, se sentant en insécurité. « Il est essentiel d’encourager les adultes à poser des questions et à intervenir s’ils observent des comportements préoccupants. Il est de la responsabilité de chacun de protéger les plus jeunes. Les violences sont préjudiciables pour leur développement et sont de surcroît illégales. S’ils se sentent incapables d’agir directement, ils peuvent se tourner vers les autorités présentes, comme un agent de contrôle dans les transports ou un policier dans la rue », souligne Clémence Lisembard.
Comment réaliser un signalement ?
En présence de soupçons de violences envers des enfants, il est possible de signaler la situation en appelant le 119, le Service national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger. Cet appel peut être difficile, car il y a la crainte de briser une famille et de voir les enfants retirés. « Il n’est pas simple d’évaluer une situation de l’extérieur. L’objectif est de protéger l’enfant en alertant des professionnels qui prendront en charge l’évaluation de la situation. Certains parents agissent par ignorance du développement approprié de l’enfant et par manque de moyens. En tant que professionnel, il est crucial de les soutenir et de les équiper. Cela peut leur offrir une opportunité de changer avant que la situation ne dégénère ou que l’enfant soit placé en cas d’escalade de la violence », conclut l’experte.